49. Hello heartache
« On a eu chaud.»
« C'est grâce à toi, si tu ne m'avais pas prévenu.»
« Parfois je sers à quelque chose.»
« J'espère qu'il y aura quelqu'un pour me sauver moi si ça arrive aussi soudainement.»
« Il est peut-être temps de commencer à te préparer.»
« Je le pense aussi. Tout ce qui vient de se passer ne fait que me rappeler que nos jours sont comptés et que nous allons tous dans la même direction.»
« Ça y est tu recommences.»
« Je recommences quoi ?»
« Comme la dernière fois. Enfin comme dans ta premier vie. Tu deviens philosophe quand tu sens que la fin est proche ?»
« Est-ce qu'elle l'est ?»
« Aucun idée.»
« En attendant, profite de Marina.»
« C'est ce que je compte faire.»
« En tout cas, elle profite. C'est quoi ce petit carnet ?»
« Elle a écrit tout ce qu'elle a à nous dire avant de partir.»
« Je sais qu'elle a du avoir très peur et qu'on a maintenant conscience que la vie peut s'arrêter à n'importe quel moment, mais elle a le droit de souffler un peu après ce qui vient d’arriver.»
« Elle veut profiter de ces précieux moments qui lui reste.»
« Je te sens bien mystérieux. Qu'est-ce que tu me caches ?»
« La Faucheuse a accepté de ne pas prendre Marina tout de suite mais seulement pour un jour. Le temps qu'elle fasse ses adieux.»
« Mais c'est horrible !»
« Je suis vraiment désolé d'apprendre ça.»
« Il faut prendre les choses du bon côté. Cette fois on a le temps de se préparer.»
« C'est vraiment court une journée !»
« C'est mieux que rien. C'est comme si elle se préparait à partir pour un long voyage. Mais je me réconforte en me disant que je la rejoindrais bientôt.»
« Ça ne me réconforte pas tellement. Et les enfants, ils prennent comment là nouvelle ?»
« Sienna pose pleins de questions. Elle veut tout savoir. Et tout comprendre.»
« La pauvre petite. Si jeune et déjà confrontée à ça.»
« C'est dur de trouver une activité à lui faire faire aujourd'hui, pour qu'elle y pense moins.»
« Vous ne restez pas avec Marina ?»
« On a eu une petite réunion de famille ce matin pour leur annoncer la nouvelle. Rosaria était dévastée. On voulait inviter le reste de la famille, mais elle a décidé qu'elle irait les voir plutôt. Pour qu'on s'habitue à son absence. Et aussi je pense pour éviter le torrent de larmes qui pourrait se déchaîner à la maison si on était tous réunis.»
« Tu ne l'as même pas accompagnée ?»
« Elle voulait faire ça toute seule.»
« Pour s'habituer à ton absence ?»
« Ou pour ne pas qu'elle s'effondre si je m'effondre. Je ne sais pas si je tiendrais en voyant tous mes enfants dans le même état que Rosaria.»
« Aurora s'est mise à la peinture, c'est plutôt pas mal pour un début.»
« Je sais que c'est sensé me remonter le moral mais rien n'y arrivera.»
« Ça valait le coup d’essayer.»
« Le cœur n'y est pas.»
« Elle non plus on dirait de toute manière. Elle a stoppé en plein milieu. Elle devait juste essayer de voir si elle pouvait exprimer ce qu'elle ressentait de cette façon. Mais c'est quelque chose a explorer quand tu iras mieux.»
« Difficile d'imaginer que ça ira mieux tant que Marina n'est plus là.»
« Rosaria a fini par retrouver le sourire.»
« Elle pleurait encore quand je l'ai aperçue tout à l’heure.»
« Je ne parlais pas d'elle. Je parlais de ta première femme.»
« C'est donc ça qu'elle a ressenti quand je l'ai quitté.»
« Elle a aussi eu une phase plutôt difficile. Mais ça passe avec le temps, je t'assure. Ça fait toujours mal, mais c'est plus facile de vivre avec.»
« Je vois qu'Aurora et Sienna ont toutes les deux trouvé une activité pour passer le temps en attendant le retour de Marina. Bon en fait Sienna n'a pas l'air de faire grand chose mais qui pourrait lui en vouloir. Par contre sa sœur, c'est une autre histoire.»
« C'est beau l'amour à cet âge. Il est arrivée aussitôt qu'il a appris. Et ça fait deux bonnes heures qu'ils discutent dans le salon.»
« Ils font plus que discuter quand même.»
« Parfois de simples mots ne suffisent pas. Et puis tu arrives à ce moment en particulier, qui n'est pas du tout représentatif de ce qu'ils ont fait. Ils ont parlé, beaucoup. Et là il s'en va, donc forcément…»
« Non mais je comprends, si j'étais à sa place, j'irais aussi trouver réconfort dans les bras de l'être aimé.»
« Si seulement.»
« Elle va bientôt revenir, ne t'inquiètes pas.»
« Mais pour combien de temps ?»
« Marina n'est toujours pas rentrée ?»
« Non on l'attends toujours. On s'occupe comme on peu. Rosaria a préparé un bon dîner, et de quoi boire pour fêter ça.»
« J'allais faire une remarque mais je ne trouve pas de meilleur mot.»
« Il n'y en a pas vraiment pour ce genre d’occasion.»
« Non ce n'est pas très courant. Tu vas tenir le coup ?»
« J'ai pas vraiment le choix. C'est inévitable maintenant.»
« Tu peux peut-être essayer de négocier encore une fois avec la Faucheuse.»
« Je doute qu'elle accepte. Et même si c'était le cas, tu imagines ? Devoir recommencer tous les jours ? C'est dans doute ça qui finira par m'emporter moi aussi.»
« Tu as donc pris une décision ?»
« Disons que je me suis fait à l’idée.»
« Je vais vous laisser en famille ce soir.»
« Merci.»
« Ça y est, c'est l'heure. Elle est en train de partir.»
« Je sais que je me répète mais je suis vraiment désolé. J'aurais aimé vous offrir plus de temps ensemble.»
« Tu me dis quand c'est fini ?»
« Promis.»
« Mon premier réflexe serait de te demander comment ça va, mais c'est évident que ce ne doit pas être le cas.»
« C'est dur mais il faut continuer à vivre.»
« Comment s'est passée la soirée hier ?»
« C'était calme au début, et puis tout le monde s'est mis à parler. A échanger des souvenirs. Et puis le temps des adieux est venu. Et le câlin pour rassurer les enfants. Et puis le calme à nouveau. Et puis tout le monde est parti se coucher.»
« Avec la boule au vendre j'imagine, en sachant ce qui allait arriver. Vous avez réussi à dormir ?»
« Tu plaisantes ? Marina et moi, on est resté debout toute la nuit. Et on a parlé.»
« De quoi ?»
« Elle voulait que je lui parle de ma vie d'avant. Rosaria, Antonio. Et elle voulait savoir ce que ça faisait d'être mort. J'ai pu satisfaire sa curiosité sur les deux premiers points, le troisième pas tellement. Parce que je n'ai rien à me rappeler. J'étais simplement plus là. Et puis tout à coup, j'étais ici.»
« Ça n'a pas trop du la rassurer.»
« Je ne lui ai pas dit ça.»
« Tant mieux. Il y a des moments où dire la vérité n'est pas la meilleure des solutions.»
« Je voulais que Marina affronte cette épreuve avec courage. C'est déjà assez terrifiant comme ça.»
« Et Rosaria ? Elle tient ? Avec la grossesse ça ne doit pas être facile. Le stress et la tension, pas bon pour le bébé.»
« Comme tous les enfants : inconsolable. Ils viennent quand même de perdre leur mère.»
« Je sais, je sais.»
« Rosaria veut appeler le bébé Marina si c'est une fille.»
« Plutôt classique... mais très touchant ! Ça serait encore mieux si c'était enfin notre héritier.»
« Tu t'arrêtes jamais ?»
« Je me dis que Rosaria ne sera sûrement pas d'humeur à retenter tout de suite si il le faut. Et je la comprends. Mais si elle porte l'héritier, vous pourrez laisser ça derrière vous et prendre le temps d'aller mieux.»
« Au moins cela aura permis à Sienna de se trouver une passion.»
« Ah bon ?»
« Elle a demandé qu'on ressorte le vieux violon d'Aurora. Elle ne l'a pas lâché depuis.»
« C'est un peu déprimant le violon.»
« Crois-moi quand on est déprimé, ça ne fait aucune différence.»
« En tout cas, ça serait une première dans la famille.»
« Aurora sait en jouer aussi.»
« J'ai bien peur qu'elle ne se soit pas assez entraîné pour que ça seoir plaisant à écouter.»
« Sienna n'en ai pas encore tout à fait là. Mais au moins ça l’occupe.»
« Dans des moments comme ça, on aimerait bien que la vie s'arrête, le temps qu'on reprenne son souffle. Mais nous ne sommes rien à ses yeux. Elle continue, quoi qu'il nous arrive. Ce pauvre bébé n'arrive pas vraiment au bon moment.»
« Peut-être que si, au contraire. Ça va nous changer un peu les idées, de s'occuper de ce petit bout.»
« Sans doute. Surtout si c'est l'héritier. Tu le sens comment ?»
« Je ne sais pas trop.»
« Je n'ai pas un bon pressentiment. Avec tout ce qui vient de se passer, je n'ai pas l'impression que quelque chose de bien peut arriver maintenant.»
« Ça rassure. Tu veux plus que nous ayons une raison de nous réjouir ?»
« Si au contraire.»
« Il ne reste plus qu'à croiser les doigts alors. J'ai bien besoin d'un peu d'espoir.»